Dans un arrêt du 11 novembre 2010, rendu à la requête de la Commission européenne, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé que la détention de "Golden shares" par l'Etat du Portugal dans "Energias de Portugal" (EDP) était contraire au droit de l'Union et, notamment, au principe de libre circulation des capitaux.
Les "Golden shares" sont des parts de capital privilégiées qui permettent à l'Etat qui les détient d'exercer un contrôle sur certaines entreprises dont l'activité est jugée essentielle pour la sécurité nationale. De nombreux Etats possèdent ainsi des actions privilégiées dans des entreprises énergétiques telle que EDP.
Dans cet arrêt, la Cour a jugé que l'Etat ne pouvait se réserver des "Golden shares" dans le capital de "Energias de Portugal", qui est l'équivalent d'EDF au Portugal. Elle a ensuite jugé que le droit de veto de l'Etat sur les décisions importantes de cette entité était contraire au droit de l'Union en étant susceptible de dissuader les investissements de portefeuille. Elle a également jugé que la limitation des droits de vote des actionnaires à 5 %, à l'exception de l'Etat portugais, était également contraire au droit de l'Union.
Enfin, et c'est sans doute cela le plus important, la Cour a écarté tous les moyens tirés de la sécurité de l'approvisionnement énergétique du pays, même en cas de crise, de guerre ou de terrorisme. La Cour constate toutefois que c'est le caractère largement discrétionnaire de ce régime qui est contraire au droit de l'Union, et non le principe même d'un dispositif visant à préserver les intérêts essentiels de l'Etat.
Certes, en faisant une lecture littérale des traités, on pourra dire que cet arrêt était prévisible, qu'il a pu être précédé par des décisions qui le laissaient entrevoir. Tout de même, à la lecture de la décision, on ne peut que s'interroger sur l'avenir des traités et du droit dérivé qui nous lient aux autres Etats membres. On se demande même si les autorités communautaires ont bien conscience de la gravité d'un tel arrêt pour les intérêts essentiels des Etats membres. Car une telle décision est inacceptable au sens propre du terme. Voilà sans nul doute un arrêt qui fera date et qui, en cette période d'incertitude financière concernant l'euro, pourrait contribuer à ébranler encore un peu plus les convictions européennes les plus solidement établies.
CJUE 11 novembre 2010, Commission c. Portugal, aff. C-543/08
Ill. DR.
Commentaires